UGO BERNALICIS TRAITÉ DE « COLLABO », UN SYNDICALISTE POLICIER RELAXÉ

Médiapart


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Note de lecture
Un représentant d’un syndicat de policiers et policières avait traité le député Ugo Bernalicis de collabo. Celui-ci avait déposé plainte pour injure publique. Le 9 novembre 2023, le tribunal correctionnel de Paris a relaxé ce syndicaliste policier.

En novembre 2020, lors de l’examen de la loi « Sécurité globale » à l’Assemblée nationale, Ugo Bernalicis, député LFI avait pris position contre le port d’arme généralisé pour les policiers et policières hors service. Il estimait que cela serait dangereux, notamment vu le nombre élevé de suicides dans cette profession.

Celui qui était alors secrétaire général du syndicat de police Synergie-Officiers avait alors fait le commentaire suivant : « Une abjection de plus. En même temps, quand on est un collabo affiché, on ne risque pas d’être pris pour cible par ceux qui veulent tuer du flic. »

À l’audience, la procureure avait déclaré que « le délit [était] caractérisé », vu qu’il s’agissait d’une « attaque personnelle » contre le député.

Le tribunal par contre a estimé que « malgré le caractère déplaisant et provocant des termes choisis », qualifiés d’« objectivement outrageants » puisqu’ils désignent « celui qui agit dans l’intérêt de l’ennemi », en référence à la seconde guerre mondiale, le syndicaliste policier ne mérite pas d’être condamné.

Les juges estiment en effet qu’un député doit faire preuve d’une « plus grande tolérance vis-à-vis de la critique, même faite sur un ton vif et polémique », tandis qu’un syndicaliste est autorisé « à user d’une dose de provocation et d’exagération ».

Pour le tribunal, « le terme “collabo”, aussi outrageant soit-il, est désormais régulièrement utilisé pour stigmatiser un adversaire politique, ce qui …. contribue à en minorer quelque peu la portée quand il est utilisé, comme ici, dans le cadre d’une polémique politique et syndicale ».

Les juges estiment aussi que les paroles du représentant de Synergie-Officiers, « s’inscrivent dans le débat relatif au port et à l’usage des armes à feu par les forces de l’ordre », qui « relève manifestement de l’intérêt général ». « Il s’agit pour le syndicaliste policier de pointer le caractère récurrent, chez Ugo Bernalicis, de positions jugées très défavorables aux policiers ». On ne peut donc pas considérer cela uniquement comme « une attaque personnelle». Et qu’il y a donc lieu

« d’apprécier avec une particulière souplesse les limites de la liberté d’expression ».

Raphaël Kempf, l’avocat d’Ugo Bernalicis explique les propos injurieux du policier par « la compétition entre les syndicats de police ». Et il précise que d’autres syndicats de policiers, tels que Alliance ou le syndicat indépendant des commissaires de police adoptent souvent ce genre de vocabulaire. Ugo Bernalicis a décidé de faire appel.